Scène de novembre

Publié le par sagesse

Le capitaine est parti.
Il a coupé les amarres.
Il nous a regardé une dernière fois.
Nous l'avons maudit, nos cris, nos hurlements dans le soleil de midi
Lui ont fait tourné la tête vers son avenir à lui.

Souvent nous croyons apercevoir au loin les secours du remord.
Et tandis qu'à mes pieds gisent un tas d'agonisants,
je songe à Chaumareys.

A la manière dont je vais le tuer, le faire souffrir
à la hauteur de ma peine quand la pour la première fois,
j'ai du tranché une lanière de notre esquif
pour me faire au goût du cuir,
ou quand je pleure pour adoucir l'eau de l'Ocean.

Dernier marin bouffeur de lambeaux de chairs
du radeau ébranlé par treize jours en mer,
j'ai arrêté d'espérer.

Sur ce cercueil flottant
Je songe à Chaumareys.

A sa main sèche tenant un verre grenat
buvant à la santé des femmes ou de je ne sais quoi.
A son verre levé comme une sentence et qui brille
doucement dans la lumière des lustres.
A son front tiède, son regard clair.

Le mien brûle et je vois trouble.

C'est peut-être parce qu'un jour me paraît une vie,
qu'au crépuscule je me laisse
glisser dans les vagues.

Et tandis que je sombre
les yeux vers la dernière lueur, le coeur rempli d'eau,
le corps libéré du fardeau, l'âme désolée,
Je songe à Chaumareys.




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O
Au moins lui n'aura pas été mangé par les autres !C'est beau.
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